Conseil : communication écrite

« Cherchons à être les partenaires de nos lectrices et lecteurs et donnons un visage à nos écrits »

Comment bien rédiger un courriel ? Avouons-le, c’est un peu chacun sa méthode et le règne de l’autodidaxie. L’apprentissage se fait sur le tas et souvent par mimétisme. Pourtant, les bonnes pratiques existent et elles s’enseignent !

Fabienne Schnyder dispense des cours de communication écrite au personnel de l’Etat du Valais, dans le cadre de séminaires de perfectionnement organisés par le Service des ressources humaines. Elle est aussi l’autrice du guide pratique intitulé « La communication écrite en Suisse : lettres, courriels et autres formes de correspondance mises au goût du jour », édité chez LEP Loisirs et Pédagogie en 2022.

Comment bien rédiger un courriel ? Vaste domaine ! Avec le concours de Fabienne Schnyder, Vis-à-vis consacre ses trois prochaines rubriques « Conseil » à ce thème.

 

Premier volet : la communication moderne et sa forme

 

Quel est le b.a-ba de la communication contemporaine ?

Fabienne Schnyder :
Fondamentalement, la communication écrite a bien changé et continue d’évoluer. Aujourd’hui, ce n’est plus l’émetteur, celui qui écrit, qui prime, mais l’interlocuteur, c’est-à-dire celle ou celui qui nous lit. L’écrit devient ainsi moins distant, plus compréhensible et aussi plus chaleureux. Pour cela, il convient de se mettre à la place de la personne qui recevra notre message. Cherchons à être les partenaires de nos lectrices et lecteurs et donnons un visage à nos écrits.

Dès lors, comment devrions-nous idéalement nous adresser à un destinataire ?

Il s’agit d’individualiser et de personnaliser nos formules d’appel. Lorsqu’il y a plusieurs destinataires, la formule « Mesdames, Messieurs » est à proscrire. On préfèrera : « Madame, Monsieur ». Lire est une activité solitaire. La personne qui nous lit se sentira plus concernée si nous nous adressons à elle au singulier.

Dans le prolongement, oublions les « Chers tous » et optons plutôt pour « Chère collègue, Cher collègue » ou « Chère et cher collègue », sans l’usage du pluriel.

Le ton de la formule d’appel peut aussi varier...

Ce qui détermine la tournure de notre formule d’appel, c’est la relation souhaitée avec le destinataire et le contenu de nos écrits. Les formules « Madame » ou « Monsieur » restent impersonnelles et froides. A l’inverse, « Bonjour Madame Perroud » offre plus de proximité et de fraîcheur, tout en restant polie et formelle.

Et la virgule ?

En Suisse romande, la formule d’appel est généralement suivie d’une virgule. Mais l’usage se perd. En Suisse alémanique, la virgule a disparu. La garder fait vieillot.

Venons-en au message. La première phrase est cruciale, dites-vous ?

Effectivement, c’est elle qui donne le ton à votre courrier. Je conseille une formulation claire, directe et positive, mettant notre lectrice, notre lecteur au centre. Il faut aussi éviter les phrases toutes faites et ce que j’appelle les « nous-nous lettres » (Ex : «Nous nous référons »). Toute prise de contact représente une possibilité de créer du lien. Saisissons-là ! En adoptant un ton négatif ou conventionnel, notre interlocuteur sera moins réceptif à notre message.

Comme par exemple ?

Comme par exemple cette entame de courriel que nous retrouvons fréquemment : « Nous accusons réception de votre lettre du 4 avril courant qui a attiré toute notre attention ». Même s’il s’agit d’une formule consacrée, « accuser » reste un mot négatif. La deuxième partie de phrase est aussi inutile : le lecteur part sans doute du principe que nous lisons tous nos courriers de manière attentive.

Soigner le final revêt également toute son importance ?

C’est juste, le dernier paragraphe doit laisser une impression positive.

En toutes circonstances ?

Oui, même et surtout si la teneur du message est délicate ou dans le cas d’un refus. Par ailleurs, il ne faut jamais conclure en regrettant une décision prise. Le destinataire ne prendrait pas la phrase au sérieux. Et à raison : il s’agit d’une fioriture, de la pseudo-empathie.

Quant aux salutations, il faut à tout prix éviter les formules standards intégrées automatiquement dans les signatures. C’est la dernière poignée de main. Il est donc important de l’adapter à notre interlocuteur et au contenu. On peut situer nos salutations dans le temps ou géographiquement, comme par exemple : « Bon weekend ; Belle semaine ; Bonne fin de journée ; Meilleures salutations de Sion, etc... ».

Concernant le titre du courriel, quelle est la règle ?

Tout courriel contient un titre, sans exception. Au minimum, ce sera un mot clé qui oriente le lecteur sur la thématique du mail.

Dans le corps du message, vous préférez les phrases courtes aux longues tirades. Plus précisément ?

Limitez-vous à 12 à 14 mots par phrase. Privilégiez une idée par phrase. Je conseille également d’alterner les longueurs de phrase et de privilégier la voix active à la voix passive.

Et puis, attention au temps verbal ?

Oui, le futur est souvent utilisé à mauvais escient. On lit régulièrement : « Tu trouveras en pièce jointe... ». Mais il faut se mettre à la place de l’autre. Dans ce cas, le présent convient mieux. Car du moment où le destinataire lit son mail, il dispose de la pièce jointe. Et pour faire plus simple et direct, un « Voici en pièce jointe » fera tout aussi bien l’affaire.

Etonnamment, vous n’appréciez pas beaucoup les «Merci » ?!

Je nuancerais : il s’agit d’un mot précieux qui facilite la communication. Mais le risque, c’est qu’il devienne un tic de langage. Je n’utiliserais qu’une fois « merci » dans un courriel et pour une bonne raison, pas plus. Comme « volontiers », « merci » fait partie de ces mots magiques qui perdent de leur valeur si on les utilise trop souvent et au mauvais endroit.

L’écriture évolue, de même que les canaux de communication. Choisir le bon canal, le bon support est aussi un enjeu ?

Effectivement, entre la boîte mail, le téléphone, les sms, Whatsapp, Signal, Webex, sans oublier la lettre traditionnelle et les réseaux sociaux, nous n’avons jamais eu autant de possibilités de communiquer. Chacun choisira le canal approprié en fonction de ses besoins.

Dans ce contexte, une règle d’or prévaut : on emploiera en général toujours le même canal que son interlocuteur.

Dans le contexte de surcommunication ambiant, il est aussi important de garder à l’esprit les avantages du contact direct. Avec un coup de fil, on peut éviter bien des malentendus.

Après les bonnes pratiques, les bonnes manières : dans le prochain numéro de Vis-à-vis, prévu en septembre, nous explorerons la nétiquette. Fabienne Schnyder nous sensibilisera aux règles de politesse et de savoir-vivre en matière de courriel. La série se conclura en décembre par des conseils de précaution face à certains risques de la messagerie électronique.

 

 

Documents

Directive du Conseil d’Etat CE-2019-057

« L’usage de notre messagerie électronique professionnelle est soumis à des règles. Elles sont réunies sous l’article 8 de la Directive d’utilisation des systèmes d’information du 1er novembre 2021. »

 

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